mardi 29 novembre 2005

Lettre à une jeune suicidée #1/5.


1. 19/07/2004 à 9h39.

Tu es montée sur le tabouret. Tu as glissé le nylon avec ce joli hochement de tête familier comme pour un de tes colliers. Dehors, le temps était couvert, un peu lourd, mais on n’annonçait pas de pluie. Tes yeux ont pris un petit pli amer, tu as donné une pichenette au tabouret, et ta vie est allée voir ailleurs si tu y étais.

Tu souffrais. Bien malin qui sait de quoi, mais le savais-tu vraiment ? Nous connaissons tous une litanie de causes, ce que les braves gens appellent des causes. Tu sais bien que ce ne sont qu’écrans de fumée, tu peux me la réciter par cœur, ta litanie d’écrans de fumée. Chagrin d’amour. Licenciement. Humiliations. Elles commencent toujours ainsi, les litanies. Elles ne sont pas pires que celles vécues par d’autres, et les autres pourtant ne se suicident pas. Pas tous.

C’est bien qu’il y a autre chose, plus caché, plus secret, plus monstrueux. Le chagrin, l’échec, la rudesse de la vie qui râpe, ne sont que les apparences ; on a tellement peur des monstres qu’on traîne tous, qu’on va en faire tout un plat, des apparences. Ce sera plus confortable. On va montrer du doigt le mari volage, l’amant désinvolte, le patron-canapé, les parents.

Tiens, les parents, justement. On va commencer par les parents.

lundi 28 novembre 2005

La boulangerie des grands boulevards.

La boulangerie des Grands Boulevards

Je vais la continuer, ma lettre. Mais par moment j’y étouffe et j’ai besoin d’air frais. Alors je joue avec Racontars, je la rejoins dans le bac à sable du diptyque. On y rigole bien. Tant pis pour le temps qui reste et pour les urgences, il y a des urgences qui deviennent des trop tard et qui de toutes façons l’auraient été, des urgences de carnaval. Quant au temps qui reste, il se perd mieux dans un bac à sable qu’à tirer plus vite que son ombre sur des moulins à vent. Alors, place au jeu.

J’étais assis à la terrasse d’une brasserie des Grands Boulevards. Il y a tant de choses à voir. Ainsi, ces deux messieurs très animés qui parlaient fort surtout le plus gros, à la table voisine. Ne croyez pas que je les écoutais, je ne me serais jamais permis, mais je les ai entendus, l’un devant son mandarin citron et l’autre devant un Perrier rondelle. Le stentor était imposant, grave et accentué. Le Perrier était fluet et basané. Pour la commodité, on appellera le basané Monsieur Brun, ou B comme Brun, droit comme un I, et le stentor Monsieur Jules, ou G comme Jules, l’air penché.

G – « Une boulangerie, quelle idée de nous fourguer une boulangerie ! Moi je n’ai rien à raconter sur une boulangerie.

B – « Ca ne mange pas de pain, une boulangerie, monsieur Jules. Vous devriez nous trouver quelque chose, vous et votre imaginaire, comme vous dites. Sinon, Akynou va ricaner.

G – « Mais qu’est-ce que tu veux que j’y mette, dans ta boulangerie ? Déjà qu’elle a un petit côté 1900 avec ses carreaux, je ne vais quand même pas y placer Anatole France ! C’aurait l’air de quoi, un barbichu à lorgnon dans la boulangerie ?

B – « Vous avez tord, Monsieur Jules. Anatole France que plus personne ne lit n’avait pas son pareil pour décrire son monde et, tous comptes faits, pour décrire le nôtre. On devrait relire Anatole France.

G – « J’en veux pas de ton Anatole. Je n’ai aucune idée, d’ailleurs je n’ai jamais eu d’imagination. Tout au plus je vais pouvoir te caser un boulanger dans ta boulangerie. Voilà. Je case. On dirait qu’il ferait du pain, qu’il serait dans le pétrin celle là elle est drôle,
** (il rit) **,
sa femme les vendrait aux gens de 4 heures du mat à 10 heures du soir. Voilà c’est tout.

B – « C’est mieux que rien.

G – « Quand on bosse de 4 heures du mat à 10 heures du soir on n’a pas le temps de vivre des monts et des merveilles, alors maintenant je sèche. Je sais pas, moi, si la femme se tire, il va faire quoi, le boulanger ?

B – « Des brioches ?

G – « C’est un coup à se faire couper le cou. Non non. Il va arrêter de travailler parce qu’on ne peut pas être à la fois au four et au moulin. Voilà, il arrête de travailler.

B – « Je ne vous suis pas, Monsieur Jules. Si le boulanger arrête de travailler, il ne se passe plus rien et votre histoire est morte.

G – « Pas du tout. Elle devient longue, au contraire, longue comme un jour sans pain.

B – « Les villageois vont s’émouvoir, de ne plus avoir de pain.

G – « Voilà une idée qu’elle est bonne ! Il y aura des manifs, des banderoles, des slogans, Villepin du pain, Villepin du pain, on va dire que le boulanger s’appelle Villepin pour la rime. Puis on va faire intervenir les pouvoirs publics. Le maire avec son écharpe tricolore va faire un discours sur la place avec les platanes et la fontaine au milieu. Le sous-préfet va chanter...

B – « Chanter ?

G ** (il commence à s’agiter et à transpirer) **
– « Ben oui, le sous-préfet au chant. Et le préfet va décréter l’état d’urgence, et les jeunes vont brûler des voitures et un ministre enverra ses polices.

B – « Oh, monsieur Jules, pas le ministre, pas la police. Il ne va pas déranger ses sbires chaque fois qu’il a un cocu dans les parages. C’est une histoire convenable ici.

G – « Bon d’accord. Je raye le nain. Mais alors il faut que je case la commission européenne aussi.

B – « Non plus, monsieur Jules. Les nons ont dit non à l’Europe, il n’y a plus d’Europe, elle ne va pas se mêler de nos histoires de boulangers. Il n’y a plus qu’un ventre mou où l’on peut s’affairer sans entraves.

G – « Pas du tout. Non à l’Europe signifiait, si j’ai bien écouté, qu’on ne voulait plus de ce monde d’affairistes.

B – « Vous avez peut-être bien écouté mais vous avez mal entendu. Je ne sais pas ce que voulaient ou ne voulaient pas les nons, mais je vois parfaitement ce qu’ils ont obtenus : la disparition pour longtemps des entraves aux affairistes. Longue vie au ventre mou, et notre pays sur un strapontin de plus en plus étroit. Et puisque votre boulanger a fermé boutique, vos villageois n’auront qu’à faire les quarante kilomètres qui les séparent de la ville la plus proche pour y acheter leur pain au supermarché. Personne ne les oblige, personne ne l’interdit, c’est la liberté selon ces messieurs.

G – « Allons allons, je vois que tu t’énerves, et on s’écarte du sujet, là. Donc pas d’Europe dans ma boulangerie. Un plombier polonais, peut-être, ou un gnome du Poitou ?

B – « Qu’allez-vous chercher là, Monsieur Jules. Non, c’est très bien ainsi, le maire, le sous-préfet, le préfet.

G – « Et c’est tout ? Je fais quoi maintenant ? Je la finis comment ton histoire ? Le boulanger retrouve sa femme et la tue, mais le ministre lui pardonne parce qu’il sait. Et voilà le travail.

B – D’abord ce n’est pas Mon histoire. Ensuite on a dit pas de ministre. Enfin, on ne tue personne dans les bacs à sable. Vous devez trouver mieux. Par exemple, la dame revient et il pardonne.

G – « Bof ! On va sentir l’artifice, le happiande hollivodien. Et comment je fais pour qu’il se libère de sa colère, le boulanger ? Elle est trop jolie, sa femme, rondelette et frisée, on dirait Valérie Mairesse, impossible de l’engueuler.

B – « Je ne sais pas, moi, c’est vous l’inventeur et moi le liseur. Il n’avait pas un petit chat, le boulanger ?

G – « C’était une chatte. On dirait qu’elle aurait disparu depuis trois jours comme font tous les chats et toutes les chattes depuis l’invention des chats, par les chemins du bois mouillé, et qu’elle pourrait reviendre au même moment. Alors le boulanger l’engueulerait comme du poisson pourri avec un long discours très émouvant, même que ce serait une des plus belles déclarations d’amour jamais écrites dans l’histoire de la littérature et du théâtre.

B ** (ému, une larme à l’œil) **
– « Il ne vous reste plus qu’à l’écrire, et je sais que ce sera une formalité.

G – « Une chose me tracasse encore. Akynou va dire qu’on a mélangé sa photo pour histoire avec son histoire pour photo, et qu’on a triché.
** (Après un instant de réflexion) ** :
– « Elle peut toujours causer, elle saura comment j’m’appelle !
** (Et l’on sentait le nuage noir de menaces planer au dessus de l’ordinateur d’Akynou) **.

B – « Que voulez-vous dire, Monsieur Jules ? Elle le sait bien, comment vous vous appelez.

G – « Tu parles ! Je vais te poser une devinette. Connais-tu la différence entre les portugais et les espagnols ?

B – « J’en connais beaucoup, des différences, et des ressemblances aussi, mais ce n’est pas la bonne réponse, hein ?

G – « Les portugais sont gais et les espagnols sont gnols.

B ** (Il a l’air catastrophé, il se tait un instant) **
– « Vous me fendez le cœur, Monsieur Jules, et je déteste les devinettes et leurs calembours miteux. Votre devinette est nulle et n’a aucun rapport avec notre affaire. J’espère que vous n’oserez pas la colporter chez Akynou.

G – « Si, justement, pour la signature. Parce que vois-tu, moi c’est exactement le contraire.

B – « Le contraire de quoi ?

G – « Moi je ne suis pagaie et je ne suis Pagnol. »

Que voulez-vous, ce n’est pas tous les jours qu’on est assis à la terrasse d’une brasserie des Grands Boulevards avec tant de choses à voir, et d’entendre à la table à côté discuter Marcel Brun et Jules César.


mardi 22 novembre 2005

Histoire de Michel de Montaigne.


Il en est qui se prennent pour Michel Sardou. Tout arrive, même qu’on se prenne pour Michel Sardou. Ce n’est du ressort ni de l’Hôpital ni de la Charité ni de la Prison, et la société n’est pas en danger. Michel Sardou lui-même est plutôt inoffensif. A fortiori les clones.

D’autres se prennent pour Michel Houellebecq. C’est déjà plus grave, mais bon, on ne va pas brûler des voitures pour autant. D’autres encore pour Michel Drucker, Michel Debré, Michel Gorbatchev, Michel Piccoli. N’y voyez aucune progression, les mots viennent comme ils viennent, et Piccoli a débarqué comme je ne m’y attendais plus. Chacun jugera comme il l’entend de la gravité du cas. Mais ni l’Hôpital ni la Charité ne devront se mobiliser, et encore moins la Prison ni la case départ. Le monde pourrait tourner en paix s’il n’y avait que cette douce folie pour nous faire l’article.

J’avoue que j’ai moi-même un faible pour Michel Rocard et pour Michel del Castillo. A chacun sa tentation, et la pente savonneuse nous guette tous qui va nous précipiter dans l’abîme.

C’est exactement ce qu’ils m’ont dit, à la Mairie. Ils m’ont dit, l’air navré, monsieur nous ne pouvons rien pour vous les trottoirs de Buenos-Aires sont déjà pris ; nous pouvons seulement vous proposer l’avenue Montaigne. Il faut vous dire que j’étais déçu. Pour être déçu j’étais déçu. Mais alors vraiment très déçu. Ce qui s’appelle, mais bon je ne vais pas en rajouter. J’avais révisé mes pas de tango d’arrache-pied au sens propre de terme, et c’est avec les deux genoux et les deux chevilles foulés que je m’étais présenté, arborant ma plus belle cravate, vous la connaissez, la rouge à pois rose et orange.

A-t’on idée de danser le tango avenue Montaigne ?

Mais voilà, j’ai trois femmes et quinze enfants à nourrir, sauf quand ils vont s’occuper de la voiture du petit Nicolas et qu’ils sont alors nourris par le grand chef. Le grand chef, ils l’appellent la princesse, je ne comprend pas pourquoi. On va manger aux frais de la princesse, qu’ils disent. C’est leur affaire, du moment que j’économise quelques repas. Alors, l’avenue Montaigne, il a bien fallu que je l’accepte.

Ne croyez pas que j’y suis allé à reculons, en rechignant, en tempêtant : je n’ai pas vraiment dû me forcer et je l’ai pris avec philosophie, bien que ce ne soit pas mon genre de graver sur le bâti aphorismes et maximes, exhortations et sentences, platonismes et aristotécies. Mon job consistait même plutôt à les effacer. Pas question de tanguer ni de valser. Agent temporaire de nettoyage et d’entretien de la voirie et de ses avoisinants, qu’ils m’ont dit que j’étais.
Temporaire. Ils doivent avoir du temps une notion qui m’échappe, voilà quarante-cinq ans que je suis temporaire, et encore je suis né un vingt-neuf septembre. Mon petit pois mental me souffle qu’en attendant encore un peu on verra bien que c’était temporaire.

Puisque mon petit pois l’a dit.

Si vous voulez me trouver c’est très simple : j’ai installé mes quartiers d’été devant le grand théâtre. N’y voyez aucune prétention à je ne sais quoi d’impossible. C’est juste que le bar est en face et que j’y tiens mes quartiers d’hiver. Le matin j’y bois mon dix-huitième pastis avant de prendre le poste. Je commence toujours par le dix-huitième ; ainsi, je ne dépasse jamais la dose, bien obligé d’arrêter un fois avalé le premier, et de me mettre au travail. Mon chef, qui me connaît, arrive juste à ce moment là pour me donner la liste des graffitis de la nuit à effacer.

Ce matin tu as trois platon, cinq aristote, deux plutarque, un averroès un petit nouveau paraît-il je ne sais pas qui c’est, une dizaine de cicéron et quatre Héraklite. Il me tutoie, le chef ; c’est un petit jeune bien blanc et bien bec, alors il me tutoie avec mes mains plus sombres au dessus qu’en dessous mais n’allez pas croire, il est gentil mon chef, et il me fait confiance. Je sais que deux choses l’agacent mais il n’a jamais osé m’en parler : ma manie d’écrire Héraklite avec un cas, et mon refus maladif d’effacer ses graffitis à lui. Pas les graffitis du chef, ceux d’Héraklite, vous bien comprendre, hein ?

Justement, c’est un cas l’Héraklite. D’où mon orthographe. Cette idée de philosophe au rabais de se guérir en se trempant dans de la bouse de vache turque ! Il ne s’appelait pourtant pas Alain F., et c’était pour le reste un vrai philosophe de vrai, si j’en crois ce qu’on dit qu’il a écrit. Parce qu’on n’est même pas sûr qu’il ait écrit ce qu’on dit qu’il a écrit, puisqu’on ne sait de ce qu’il a écrit que ce qu’on a dit qu’il avait écrit. Mon petit pois a du mal à suivre, mais du coup je n’arrive pas à effacer des murs de mon avenue ce qui est écrit dont on dit que c’est lui qui l’a écrit. Surtout que, je vous dit tout ici, je suis plutôt très d’accord avec lui sur bien des choses et nous ferions mieux d’y repenser et d’y revenir.

C’est un cas majuscule, mon Héraklite et je le garde ainsi. Mais j’efface aristote et platon et les autres, je gratte et j’efface. Christian Dior, Valentino et le Plaza-Athénée ne balayent jamais devant leur porte, c’est moi qui les balaie.

Et sous la paille de riz vole un nuage de poussière de diamant.
Ecrit le 22 novembre 2005.

lundi 21 novembre 2005

Une suite improbable

Une suite improbable

Finalement, je me suis rabiboché avec la vieille. Ne croyez surtout pas que je me suis mis à l’aimer. Les miracles n’existent que dans les histoires inventées. Seulement il fallait bien trouver la faille.

Un jour, en désespoir de cause, elle a été obligée de m’appeler au secours. Dimanche soir à 20heures, je ne sais pas pour vous, mais moi, et dans tout mon quartier, c’est très difficile de trouver un dépanneur électronicien. Et quand je dis très difficile, c’est parce que je fais volontiers dans l’euphémisme béat.

Pour que vous compreniez bien, je dois vous dire que je suis dans l’électronique. Le Hard. Evidemment, les imbéciles rigolent à chaque fois, avec ma petite gueule de pédé comme ils disent, m’entendre parler de hard les fait rigoler. N’importe quel humain digne de ce nom sait bien que c’est par opposition au Soft, mais les imbéciles n’ont pas besoin d’être humains pour pouffer.

Mes collègues m’appellent doigts de fée. Là aussi ils rigolent, mais ils sont braves mes collègues, et derrière la plaisanterie douteuse je sais qu’il y a la reconnaissance de mon talent. Personne ne sait mieux que moi repérer la soudure défaillante dans l’ordinateur qu’on m’apporte en catastrophe, d’ailleurs rien qu’à le regarder de loin, je sais ce qu’il a, une sorte de don, de magie. J’entre en symbiose avec la souffrance de la machine, et je vais direct au circuit défaillant, parmi les trois millions de circuits de l’appareil. On dit que je serais capable de réparer un transistor dans une puce d’un demi millimètre carré avec un chalumeau de chantier naval.

Alors, la vieille et sa télé en panne, il fallait bien qu’elle en passe par moi. Elle devait ronchonner depuis un long moment quand elle s’est enfin décidée à monter me voir, vous vous rendez compte, l’humiliation grave. Mais De Villiers devait passer à 20 heures, elle ne pouvait pas le rater. Il me restait cinq minutes pour remettre la vieille carne en route, parce que la télé était à l’image de sa propriétaire. Pleine de boutons, aucun programme. J’ai fait la réparation.

Alors depuis, on est copains. Elle le croit, du moins. Elle me fait des sourires quand je la croise, et elle n’hésite pas à me faire descendre chaque fois que l’image se brouille. A chaque intervention, mon Dieu que je suis délicat, je lui mets un petit plus. Une chaîne supplémentaire qu’elle ne pouvait régler, un signal plus fort, une netteté mieux réglée. Un jour, je lui ai suggéré d’acheter un magnétoscope, je lui promettais de l’installer et de le régler. Ce quelle fit, afin de pouvoir enregistrer et se passer en boucle les discours de Villiers et ceux qu petit Nicolas qu’elle venait de découvrir. Il ira loin, celui-là, qu’elle me disait la larme à l’œil.

Pendant ce temps, je continuais patiemment à explorer le trésor de ma cheminée. Ce que je dois vous dire ici de mes découvertes ne pourront être répétées par personne. Les historiens eux-mêmes seraient obligés de revoir leur copie de tous les événements marquants du XXème siècle. Ma grand-mère avait soigneusement filmé tous les passages dans son immeuble du temps de sa splendeur, et sans rien vous dire de plus, je peux vous dire que du beau monde il y en avait, et que tout ce beau monde s’y croisait, s’y saluait, et quel meilleur endroit qu’ici pour manigancer l’Histoire.

Ma grand-mère avait un associé très performant dans les techniques de l’époque, celui qui devint son mari, comme quoi les talents ne viennent pas de nulle part, et sous sa couverture de menuisier savait très bien installer les caméras et les microphones discrets au quatrième étage, justement dans mon appart. J’ai retrouvé des traces des anciens circuits, et je dois dire que mon grand-père, c’était un fortiche.

Vous avez compris que la fortune de ma grand-mère ne venait pas tant des activités de va-et-vient de l’immeuble que des activités postérieures. Elle a toujours promis de ne jamais rien divulguer et elle a toujours tenu parole. Mais, pas folle, tous les films ont été soigneusement encastrés dans le mur de mon trésor. Nul ne saura jamais la vraie histoire du XXème siècle, sauf si…

Je me suis amusé à faire un petit montage des séquences les plus affriolantes. Le transfert d’un 8mm hors d’âge mais en bon état sur une cassette vidéo ne présente aucune difficulté pour moi, même sans lecteur de 8mm. Je ne vous donnerai pas la recette, c’est mon gagne-pain. Comme tout bon monteur, entre chaque séquence j’ai placé une jolie transition : un gros plan da la page du livre de compte où sont répertoriés tous les versements effectués par l’acteur de la séquence précédente, avec l’enregistrement sonore de la négociation. Ma grand-mère est d’une méticulosité extraordinaire, tout y est, surtout les liens de cause à effet.

Alors, le jour où madame Arthur, ma grand-mère, m’a demandé de lui montrer comment marchait son magnétoscope tout neuf, je ne me suis pas fait prier et nous avons visionné ensemble la cassette. J’avais précisé juste avant que si le magnétoscope marchait mal et devait détruire la cassette, ce n’était pas grave, j’en avais une autre en lieu sûr, et ma grand-mère m’avait même félicité pour mon professionnalisme.

Depuis cette soirée, tout va bien. L’appartement du quatrième situé sur le même palier s’étant libéré, un petit vieux qui ne payait plus et qu’elle avait fait expulser en février, elle m’a spontanément proposé de le raccorder au mien, sans augmenter mon loyer.

Le plus grandiose est qu’elle me laisse garer ma voiture devant la porte, et que quiconque prendrait la place serait gratifié de la rayure du siècle, on le sait dans le quartier et on se demande pourquoi une Ferrari seule à le droit de rester stationnée là sans encombre.

Je n’ai plus trop le temps de vous parler de ma mère, et de comment tout s’est su à la fin. La jolie fille qui tient la réception de l’Hôtel juste derrière chez moi, Cité Bergère, à qui je n’ai pas tout raconté mais un peu quand même, nous sommes copines et quand elle me regarde avec gourmandise elle se reprend en me traitant de confiture aux cochons, a eu récemment l’occasion de parler longtemps avec elle, juste avant le drame.

Elle saura vous en parler bien mieux que moi.

jeudi 17 novembre 2005

De la beauté des femmes #9/9.

Avant de finir, je rattrappe un oubli inadmissible: insérer le lien vers l'article dont auquel je cause, et dont la lecture est recommandée, non seulement pour comprendre ce que j'cris à son sujet, mais aussi par ce qu'il contient d'intressant et de stimulant. Parce que tel est le cas, même si je fais la fine bouche. Voici le lien:
Si monsieur Blogue est gentil avec moi, et avec un peu de chance, il fonctionnera.
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Je reviens à mes moutons, billet #9/9, de la beauté des femmes.
Je n’ai toujours rien dit de la séduction. En passant, je laisse un petit mot à propos d’Ingres et de Delacroix que j’estime : ils ne sont pas mes peintres favoris.

Ah oui, j’ai aussi oublié de vous signaler que la soumission volontaire des femmes, dont l’Occident se serait fait une spécialité, est répandue en Orient à des degrés que l’Occident n’imaginerait même pas. Je n’aime pas les faux procès, et cet article m’a semblé en être un. De mauvaises raisons pour une juste cause.

Je vais finir avec une anecdote, qui peut-être n’a rien à voir. Une musulmane de ma connaissance voilée de pied en cap, entrant chez moi et s’étant alors découverte, à ma question sur le bien fondé de ses voiles, c’était plus fort que moi de la lui poser, m’a d’abord répondu que c’était la volonté de Dieu. Elle a senti le côté parfaitement inutile de sa réponse alors que je n’avais rien dit ; je le pensais si fort qu’elle avait dû entendre. Elle a donc ajouté qu’elle mettait les voiles pour cacher ses cheveux sinon les hommes devenaient fous. Ai-je dit qu’elle est plutôt jolie ?

Incorrigible, j’ai poursuivi en lui faisant remarquer que sa réponse signifiait qu’elle me tenait en bien petite estime, soit en tant qu’homme puisqu’elle me pensait capable de folie à la seule vue de ses cheveux, soit en tant que non homme puisqu’elle se dévoilait ainsi devant moi chez moi là tout de suite.

Ce n’est pas pareil, vous êtes chez vous, dit-elle.

J’ai fait semblant de comprendre et nous avons parlé d’autres choses. J’écrirais mille pages que je serais bien incapable de comprendre, en réalité, le sens de cette phrase. Et là réside peut-être le mystère que je voulais débusquer en écrivant sur cet article, et qui garde son opacité toute orientale.


Mille pages ne suffiraient pas à traiter de la beauté des femmes.

(FIN)

mardi 15 novembre 2005

De la beauté des femmes #8/9.


Ainsi, nous autres, hommes occidentaux parfois buveurs de bière pour les besoins de la cause, nous n’avons plus besoin d’ourdir des complots, ils s’ourdissent tout seuls. J’ai bien compris ce que l’article dénonce, n’est-ce pas ? Ce que cet article avance un peu étourdiment ma foi est-il certain, et ne pourrait-on pas retourner la veste pour remarquer que le futile et la fanfreluche sont aussi qualités masculines dont nous nous délectons, y compris avec une agrégée de philosophie comparée et de mathématique aléatoire réunies ?
Je ne sais si finalement je suis normal ou monstrueux. Je vais vous décevoir : un harem peuplé de femmes lascives et nues façon Ingres révisé Delacroix ne m’a jamais fait fantasmer. J’aurais plutôt tendance à me tirer vite fait si le hasard m’y égarait. Il se peut que quelque journaliste hébété de l’entourage de nos dames prenne l’œil égrillard à cette évocation et parte aux putes derechef.
Vous voyez, je sais faire la provoc moi aussi, me vautrer dans le limite, bien que je me force un peu j’avoue. Mais l’attitude de quelques journalistes rencontrés dans les couloirs des lieux où l’on rencontre des journalistes ne suffit pas à juger l’occident. C’est en réalité beaucoup plus compliqué. Je n'aime pas les déductions hâtives quand devant moi se pressent les exemples contraires. On va me faire le coup de la règle et de l'exception, le coup de la règle sur les doigts.
A l’inverse, un longue joute verbale dans un cénacle hostile face à une adversaire déterminée, qu’elle s’achève par une victoire, une défaite ou un compromis, m’entraîne dans les jours qui suivent dans une phase agitée où l’adversaire en question tient une place considérable, et je ne saurais même pas vous dire si elle est blonde ou brune. Ne dites rien à ‘Aliénor, c’est la championne du monde des joutes verbales, elle y a le dernier mot, ceux du genre missiles de missive.
(#9 à suivre, pour en finir)

mardi 8 novembre 2005

De la beauté des femmes #7/9.

Où en étais-je ? Ah oui, la séduction, la beauté des femmes. Il serait temps que je m’en occupe, après ces détournements, ces digressions, ces diverticules. Divertissons-nous. Il est reproché à l’Occident, eaux majuscules, d’avoir institué un régime minceur grâce auquel la femme est plus opprimée et anéantie que dans tout l’Orient réuni, eau majuscule. On va bientôt nous expliquer que le voile est un instrument de libération. J’extrapole, là, et je suis injuste je le sais, pourtant c’est ainsi que je ressens le bout de cette piste, là-bas juste derrière les collines de l’horizon qui poudroie.

Je vais me permettre une observation. Ce n’est probablement pas un argument, tout au plus un petit caillou dans le jardin de mosaïques, de fontaines et de jets d’eaux comme on en voit là-bas.

Certains journaux féminins, et le premier d’entre eux j’en ai oublié le titre mais vous le trouverez peut-être, on été créés, écrits, portés, et sont encore dirigés par d’éminentes féministes. La parole y est donnée à tous les combats que mènent les femmes et quelques hommes beaucoup plus nombreux qu’on croit, vers un monde d’égalité. D’accord, je dis égalité, peut-être ce mot n’est-il pas le mot juste.

On pourrait s’interroger sur le choix de ce mot, en proposer mille autres qui n’iront pas non plus pour finalement y revenir bien que ce ne soit pas le mot juste. Gardons le. Il y a des gens qui mènent des combats en des lieux où il est très difficile et très dangereux de les mener, surtout très dangereux ; je ne sais pas si ces gens fayotent les médias occidentaux mais bien souvent ils me semblent admirables, et derrière mon écran je sais fort bien ne pas être capable du quart du commencement de ce qu’ils sont, de ce qu’elles font, de ce qu’elles risquent.

Pour autant, de ne pas être persécutée ni musulmane ne rend pas le combat vain. Ne me faites pas dire ce que je sais qu’on me fera dire.

Ces mêmes magazines sont recouverts de ces fils de fer à gros seins, ces mêmes magazines sont remplis de régimes de vide, ces mêmes magazines se complaisent dans le futile et la fanfreluche, dont l’occident prétend du moins on prétend qu’il le prétend, que ce sont des qualités féminines, ben voyons. Alors, bébé et eau du bain ?
(#8 à suivre)

lundi 7 novembre 2005

De la beauté des femmes #6/9.


Il me semble que j’étais parti pour écrire sur la séduction des femmes. Il serait temps que j’y songe au lieu d’errer. Avant cela, il faut se poser deux questions et tenter d’y répondre, et si l’on n’y trouve pas de réponses au moins s’efforcer de bien comprendre les questions.

La première est de se demander si la forme et le fond sont, comment dire, indissociables ou séparables. La forme et le fond. La forme ou le fond. La forme contre le fond. La forme avec le fond. J’ai ma réponse à moi tout seul et comme je ne suis pas un directeur de thèse je ne vous la donnerai pas. Comme je ne suis pas chien je vous la donnerai. Alors je vous la donne.

Si les habits ne font pas les moines, ils peuvent les défaire. Je ne répèterai pas, c’est tout pour ma réponse. Je vous sens déçus ; en pareille circonstance, Kant aurait dit : demerden sie sich, ce qui est très philosophique et très allemand. On peut aussi ajouter, je peux aussi ajouter du haut de mes petits talons, que l’âme et le corps sont une seule et même chose et que la mort de celui-ci est celle de celle-là. Ce n’est pas Spinoza qui me contredira, qui d’ailleurs lui aussi est mort. Vous voyez, les philosophes peuvent débarquer à l’improviste aussi chez moi.
La seconde question est de se demander si la séduction est vraiment nécessaire entre hommes et femmes et si nous ne pourrions pas parler entre nous comme tout le monde et comme si de rien n’était, avec des paroles rationnelles, raisonnables, raisonnées, raisonneuses, résonnantes. De vraies cloches.
Vous devinez ma réponse à cette question. Inutile d’en rajouter, j’en rajoute donc. Même entre hommes la séduction est nécessaire, alors pensez entre hommes et femmes, et que l’on soit d’orient ou d’occident. La séduction, l’apparence, l’habit, la forme, le style, l’élégance, l’affect, le verbeux, l’inutile, le décorum, la pompe et ses œuvres, sans ce fatras nous n’existerions même pas. Profumo di donna.
Alors, heureux ?

(#7 à suivre)

dimanche 6 novembre 2005

De la beauté des femmes #5/9.

Avant même de convoquer Molière, c’est Kant qui est venu sur le devant de la scène. Alors là je dis bravo. Il paraîtrait qu’il a proféré des horreurs sur la femme, en gros que plus la femme est cerveau moins elle est sexe. Bien que ce ne soit pas dit, je suppose que l’inverse s’applique de la même façon. Je vous fais encore une petite confidence, ce n’est pas la première ce ne sera pas la dernière. Quand je vous dis qu’il ne faut rien répéter.

La ci-devant confidence : Marx a dit des horreurs sur la femme lui aussi, il en a même fait sur la sienne, sans parler des enfants. Tant qu’à convoquer les philosophes, il faut bien que j’exerce mon droit d’alerte : Marx est dans le coup.

Revenons à Kant.
Je dois vous dire que le très peu que j’ai lu de Kant m’est resté totalement incompréhensible et pourtant en traduction française, et que les très rares fois où j’ai cru comprendre je me suis collé au plafond comme la mouche du coche tellement je n’étais pas d’accord. Alors tenter de me balancer Kant comme la preuve de l’universalité de ma malfaisance masculine occidentale n’a aucun effet sur moi.
Même pas mal.

Voilà pour Kant.

(#6 à suivre)

samedi 5 novembre 2005

De la beauté des femmes #4/9.

J’ai encore lu l’article. Rien à faire, rien n’adhère.



Revenons à z’aujourd’hui. On reproche donc à l’occident d’enfermer les femmes dans un idéal de beauté où l’apparence va l’emporter sur la vérité, où la forme va dominer le fond. La forme, les formes bien sûr, trop facile.

Les canons de beauté vont obliger les femmes à un jeûne permanent, un ramadan perpétuel, une ascèse dévorante, dévorante est le mot, qui vont la transformer en brindille impensable et impensante. Victoire absolue de l’homme qui économise polices, tissus, grilles et moucharabieh. La perfection universelle de Claudia Schiffer va réduire en esclavage la moitié de l’humanité à l’insu de son plein gré, et, tiens c’est curieux mais c’est l’article qui le dit, les orientales ne sont pas les dernières à se ruer dans cet esclavage. Entre nous puisqu’on en est aux confidences mais surtout ne dites rien à personne, je préfère les hanches de Laetitia à la perfection de Claudia, et les défauts de l’une me la rendent beaucoup plus aimable que la perfection de l’autre. Chut.



Je l’ai déjà dit, j’aime me répéter ; un autre l’a tellement mieux exprimé que moi que je vais lui voler son idée sans la moindre vergogne : je n’aime pas les fils de fer à gros seins. Bien peu d’hommes autour de moi aiment les fils de fer à gros seins ; je dis bien peu, vérification faite, aucun ; que les fils de fer soient des automates aux yeux vides ou des agrégées de philosophie comparée et de mathématique aléatoire réunies. Et toutes celles qui se sont fabriquées ainsi vous le diront, elles rament pour trouver l’âme sœur.

A moi elles le disent, du moins. C’est fou ce qu’on peut me dire, à moi. Je n’ai pas fait d’études mondiales sur le sujet, je ne suis pas Bourdieu ni Diable, et je vous écris du haut du mauvais côté de ma lorgnette. Le petit îlot où je vis fait que l’article de Madame Chollet est totalement à côté de ma vérité. Je dois tenter de débroussailler le mystère, mais avant de continuer mon exploration, j’ai encore un compte à régler.
(#5 à suivre)

vendredi 4 novembre 2005

De la beauté des femmes #3/9.

La thèse est séduisante. On s’y laisse prendre, on suit la pensée avec aisance, tout vient à point. L’homme occidental inculque aux femmes, par une subtile propagande, le goût du jeûne permanent ou plutôt le devoir du jeûne permanent, et lui invente le besoin du voile mental, pour mieux ainsi profiter de son dévoilement soumis ; il rejoint et même dépasse l’homme oriental qui en est encore à la soumission policière de la femme. Il paraît que cet oriental raffiné en souhaite l’érudition alors que l’homme occidental ne rêve que de connes dans son lit. Puisqu’on vous le dit.

La démarche est habile qui va nous ensevelir dans nos contradictions. C’est du moins ce que j’en comprends et que je refuse, vous avez dû le deviner. Je ne crois pas avoir caricaturé ce qui nous est expliqué. Bon, le mot conne est peut-être un peu forcé et pour rien au monde la dame n’aurait osé utiliser ce mot. Moi, vieil hétéro bougon, c’est ce mot que j'entends en lisant les euphémismes utilisés dans l’article sur la passivité attendue de la femme, la passivité tentante dont on écrit que je l’attends tant.

A l’appui de la thèse, Molière est convoqué ; accusé Molière levez-vous. Les choses sont claires : ici l’on n’est pas dans l’étude de fonctionnement d’une société mais dans la stigmatisation individuelle. On puise dans l'entourage. Des journalistes disent et font ceci, des peintres du Louvre peignent cela, et Molière, lui-même en personne, y va de son complot contre les femmes. Le pire est que ce langage sur Molière ne m’est pas inconnu ; d’obscures féministes sommaires s’y sont déjà risquées.

Les bras m’en tombent. Méconnaître à ce point le mécanisme sur lequel fonctionnent les deux pièces mises en cause, Les femmes savantes et Les précieuses ridicules, me conduit à soupçonner que l’on est en train d’accuser le chien d’avoir la rage pour mieux le noyer. Je croyais naïvement que, si ridicules que semble l’apparence des précieuses ridicules, ce sont les messieurs qui les fréquentent qui en réalité le sont, et que la défaite finale qui emporte les demoiselles n’est que l’écran de fumée derrière lequel se cache Jean-Baptiste et se protège, pour être théâtreux il n’en est pas moins homme ; que les femmes savantes sont infiniment plus savantes et plus dignes que les hommes qui les entourent, elles veulent la connaissance pour avoir la connaissance quand ils la veulent pour avoir le pouvoir.

Oublier ce fondement du théâtre de Molière sous prétexte de lui faire un procès est détruire l’idée féministe qu’on aimerait défendre. Pour finir, cette pointe : on ne connaissait pas la taille 38 alors et les belles femmes étaient rondes.
(#4 à suivre)

jeudi 3 novembre 2005

De la beauté des femmes #2/9.

On peut commencer par cette affaire de l’intelligence et de l’érudition.

Je vais me laisser aller à quelques confidences. Je suis un occidental hétéro, autant vous dire que j’aime croiser des femmes dévoilées. Je n’ai pas bien compris en quoi j’avais du pouvoir sur elles de ce fait, mais puisqu’on me le dit, mettons. Pour autant, dévoilées ou non, la fréquentation des connes m’insupporte exactement comme m’insupporte la fréquentation des cons. Ni plus ni moins, mais chaque fois beaucoup.

Soyons clairs entre nous : à moins d’interrompre ici même la lecture, vous devrez accepter cette idée étrange que je suis censé ne pas faire partie de ce groupe de l’espèce humaine que j’ai nommé ci-avant, et vous non plus. Il paraît qu’on est toujours le con de quelqu’un mais peu me chaud, c’est celui qui le dit qui y est et réciproquement.
Cette dame Mona qui écrit sur mes goûts supposés d’occidental ferait bien de vérifier qu’elle ne verse pas dans la généralisation abusive ; l’article a ceci de désagréable que, loin de tenter d’analyser des comportements collectifs à partir d’enquêtes, ce que peut-être font les livres, il se borne à juxtaposer des comportements individuels concordants pour aboutir à la conclusion de ce que moi, homme occidental et à ce titre, je suis supposé aimer chez la femme.
Qu’autour de moi je multiplie les comportements inverses, ne sera pas pris comme un contre-exemple venant infirmer la démarche, mais comme une anomalie, une île flottante, un microcosme. Je ne le vois pas de cet œil là, et concordance pour concordance, mes généralisations seraient tout aussi abusives que celles que je lis de Mona. Je n’y peux rien si les amis journalistes de Fatema Mernissi sont comme ils sont, ils ne suffisent pas à conclure une étude, à la rigueur un pamphlet.

Mais j’ai dit que je ne parlerai pas des livres mais seulement de l’article, alors pan sur le bec.
(#3 à suivre)