jeudi 25 octobre 2007

Un scandale présidentiel #1/3.

1. Un commentaire venu de chez Anne CHIBOUM, sur un billet d’aile.

Bon d’accord, j’ai un peu changé certaines articulations, et non des moindres. Mais c’est la rançon du différé sur le direct.

L'émotion, vous dis-je, comme en son temps était le poumon.

Je me demande si je n'ai pas un mauvais esprit anti français. Je me demande pourquoi le petit homme a choisi cette lettre laïque et obligatoire, à lire. La lettre de n'importe qui sur le point de mourir serait tout aussi bien trouvée, comme tu l'as exactement dit, Anne.

On aurait pu lire d'autres lettres écrites par ses petits camarades, si par hasard on les retrouvait. Oui mais elles sont un peu trop militantes, non ? Neutralité qu’ils disent, neutraliser qu’ils font.

On aurait pu lire d’autres lettres de Guy Môquet, il a bien dû en écrire pendant le court temps de son combat, ce que pudiquement notre petit ami haut perché oublie. Mais ce seraient des lettres militantes, sans doute, où ce jeune homme décrit ses véritables ennemis, le grand capital d'alors, la haute finance de toujours, leurs complicités avec les envahisseurs, les dégâts qu'ils provoquent et qu'il faut réparer ; il n'y oubliera pas les bons français du jour qui aimaient Hitler, il n'oublie pas les patrons des patrons, dont l'un d'eux, comme par hasard, fut celui qui mit son nom sur la liste des 27. Sarkozy connaît-il le nom de ce bon français de patron qui mit le nom de Guy Môquet sur la liste ? En a-t-il cure ?

Les lettres militantes sont bonnes au cabinet, dit le petit homme.

Il a oublié ces autres lettres de Guy Môquet, l'ami président. Jamais connues, peut-être. Elles comptent pour du beurre, ces lettres ? Ne seraient elles pas le seul et véritable testament à la nation, bien plus que le testament aux siens à qui il évite les discours de lutte pour s'en tenir à l'amour qu'il leur porte, juste un fils un frère un ami qui aime, émouvant mais je le dis, banal, heureusement banal, émouvant parce que banal, émouvant parce que chacun de nous peut s'y reconnaître dans cette banalité là, nous aurions écrit pareil sans aucune forfanterie. Tous les français auraient écrit pareil sans avoir de leçon à recevoir, pour peu qu'ils aient eu envie de combattre l'ignominie. Elle n'est jamais où l'on croit qu'elle est, et aujourd'hui elle est dans les sommets démocratiques. Nul besoin d'Hitler.

Je prie chacun de me pardonner, je ne trouve rien de patriote ni de national ni de républicain dans cette lettre à lire, et seules des motivations patriotes, nationales et républicaines pourraient justifier d'une lecture obligatoire et laïque.

Qu'elle contienne de belles paroles, des paroles aimantes, particulièrement matures pour un gamin de dix-sept ans, c'est évident et c'est bouleversant, mais ne le devient-on pas toujours, évident et bouleversant, dès lors que la mort s'approche et qu'on la regarde en face en écrivant ? Ce sont avant toute chose des paroles intimes, assez pour me mettre mal à l'aise dans ma position de voyeur.

Soixante millions de voyeurs par la volonté présidentielle. Ce n'est pas le moindre pilier du scandale.

Péroraison : cette lettre n'a rien à faire sous nos yeux. Il en est de plus éducatives et civiques, il en est de moins intimes et secrètes. L'exhibition des tripes et la dissimulation des vraies raisons du combat de Guy Môquet sont les seules mamelles de cette gesticulation médiatique honteuse.

#2/3 à suivre.

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4 commentaires:

Anonyme a dit…

J'aime quand les idées et les billets ricochent, merci encore pour ce commentaire qui résonne bien avec mon impression sur cette décision présidentielle...

Anonyme a dit…

Suis-je en avance sur les Dalton ? Il me semble comprendre plus vite que mon ombre, là s'arrête la comparaison et Ma' dans tout ça, elle a ses lettres secrètes ?

Anonyme a dit…

Et tant qu'à faire de parler de cette période, on aurait pu leur faire lire le poême "l'affiche rouge" et sa mise en musique par Léo Ferré... Ceux là étaient étrangers, adultes et combattants volontaires pour la France.

Andrem Riviere a dit…

J'y pensais si fort, à cette chanson, François, en écrivant.

Je n'ai pas osé l'évoquer, une sorte de crainte devant le trop facile, le trop directif.

"Parce qu'à prononcer leurs noms sont difficiles..."

Mais plus loin il y aura une petite pensée pour Aragon l'ambigu. Cette chanson résonnait trop fort et elle est sortie par ce nom.