lundi 8 mars 2010

IMMIGRATION #4 - Quarante millions

Nous voici à la Libération, avec aile majuscule. La France a vaincu le cousin germain, dit-on, et s’est redoré le blason démocratique. C’est une France de quarante millions de républicains laïques et obligatoires qui fêtent la victoire, quarante millions de vainqueurs surtout ceux de la onzième heure. Moins quelques femmes courageusement tondues.

Je n’étais pas à cette liesse, mais il me faut partir de ce moment zéro si je veux respecter ce dont je tente de me faire l’écho. Alors je m’y place pour la suite. Nos quarante millions étaient-ils quarante millions de combattants deux ans plus tôt et quarante millions de républicains cinq années auparavant, simplement poser la question est déjà trop demander revenons au point zéro, avant il n’y avait rien.

Silence dans les rangs. Nous voici à la Libération, prêts à reconstruire vaillamment le pays détruit avec le plan Marshall et les trente glorieuses dont on fait grand cas et dont je suis. Les français sont nuls et ne font qu’un enfant virgule cinq à leur femme, puisque je te le dis, et ils restent donc quarante millions. Mais ce sont des français, fils de ceux qui ont sauvé nos valeurs, les vrais, quoique ne l’oublions pas, il vient de dire qu’ils étaient nuls. Il ne va pas s’embarrasser d’un début de contradictions, les français sont nuls mais les valeurs sont vraies, que viens-tu chercher noise ? Les français, les valeurs, France éternelle et compagnie, tu reconnaîtras les tiens et tu n’en sauras pas davantage.

Je ne sais pas bien ce que sont cette France éternelle et ces valeurs sans les français qui y vivent, ou avec de si mauvais français, paresseux et jouisseurs. Mais le discours n’a que faire de ces interrogations suspectes, la lave ne craint pas l’ironie, le torrent continue de plus belle.

Tiens, avant de poursuivre, un petit caillou blanc qui surnage : les fils de Michalski, de Battistoni, ceux de Rodriguez et ceux de Pereira, qu’il y a dix ans on nommait pollacks ou ritals ou autres doux noms, tous désormais sont dans le bateau du discours parmi les vrais français, ils sont dans les quarante et la lave ne s’en est pas aperçue, sinon qu’ils ne font pas assez d’enfants comme tout français qui se respecte. Cette intégration là n’était pas attendue et je la prends tant qu’il est temps.

Un hommage du vice à la vertu ne se refuse pas.

4 commentaires:

Lyjazz a dit…

Oui mais les étrangers de couleur sont ceux qu'on repère de loin, dirait CharlElie Couture.
Et je le suis.
Or donc... j'attends la suite !

Andrem Riviere a dit…

On y arrive, Ly.

Marie a dit…

Dans les quarante millions dont tu fais état au moment de la libération, étaient au moins 25 millions de femmes ayant participé à l'effort de guerre en travaillant dans les usines, dans les champs et partout où les combattants n'étaient plus, les enfants, Italiens et Polonais déjà en place depuis la guerre 14-18 et j'en passe.
Combien d'hommes sont morts qui ne pouvaient plus faire d'enfant à des femmes qui avaient commencé à vivre autrement ... Ce n'est pas une contestation, juste un complément.

Andrem Riviere a dit…

@ Marie. Attention. J'ai volontairement entremêlé les thèses et mes antithèses. La question ne porte pas sur savoir s'il y a eu dénatalité ou non après la libération.

La question n'est même pas de polémiquer sur l'envahissement massif ou sur l'arrivée nécessaire de tous les travailleurs du sud, débat inutile que le simple examen démographique suffit à trancher.

La question est d'observer que même en allant au bout du fantasme, au bout de la peur, au bout de l'exagération et du mensonge, on ne peut conclure à la perte de notre société, à la disparition de notre culture, à la fin de notre civilisation, pour autant que ces gros mots aient la force que nous leur donnons.

Sur le fond, je ne suis pas d'accord avec ce que tu écris. Ce qui était vrai en 1918 ne l'a pas été en 1945, et le baby-boom est bien là pour me conforter.