mercredi 10 mars 2010

IMMIGRATION #5 - Copulations laborieuses

Voilà où le bât blesse ; ils restent quarante millions et pas un de plus et il faut des bras pour reconstruire. Imparable mon cher Watson, on ouvre la porte à l’erreur majuscule du millénaire, à la ruée sauvage, on tombe dans le piège tendu par l’histoire, le grand complot basané. Les voici qui débarquent massivement tous tant qu’ils sont, les régiments, les hordes.

Les recruteurs parcourent les oueds et les oasis, les djebels et les médinas, ils s’installent derrière la petite table et ils cochent les noms des volontaires, longues files d’hommes éblouis du miroir aux alouettes et du projecteur en pleine face. Parfois l’un d’eux sort de la file et rentre chez lui retrouver son lopin et ses chèvres. Il fait le mauvais choix et de désespoir il se suicide d’une balle dans le dos. Voilà comme ils nous ont envahis, les comploteurs. Tu sais comme moi que seule la dernière phrase fait partie du discours brûlant et que je trahis la pensée de qui je cite en ajoutant mes couches. Dois-je utiliser le mot pensée ? Tout le monde sait pourquoi l’on met des couches parfois.

Si peu à peu les méthodes deviennent moins expéditives, le flux ne se tarira plus et les mines extrairont, les usines usineront, les cités radieuses irradieront, trente glorieuses vous dis-je, faut-il en être fiers, faut-il croire à ce rêve de fous ? La faute à qui ? L’entends-tu bien, le discours qui monte, le discours de l’autre soir. Quarante millions de vainqueurs devenus paresseux au point de se livrer nus à l’appétit de ces gens-là, on dit ces gens-là chez ces gens-ci, et si l’on oublie que personne n’avait vraiment demandé à venir c’est juste que c’est juste mais que la lave ne l’entend pas de cette oreille.

Courage, je dois laisser plus de place au discours, cesser de m’interposer, aller au bout de sa logique, puisqu’il doit bien y avoir un bout, et une logique. Non ?

Quarante millions de paresseux qui vont se laisser manger le pain par vingt millions de faméliques venus chez nous sans qu’on ne leur demande rien, qu’il dit. Pourquoi vingt millions ? Le calcul est simple, quarante et vingt font soixante, soixante millions d’habitants désormais. Je sais que mon ironie se mélange au point qu’on commence à se demander où elle finit où elle commence, comment la séparer l’une de l’autre. Je ne sais pas transcrire le propos que je voulais transcrire avec l’honnêteté dont je me réclame, c’est trop difficile, alors je parsème, je ventile. Puzzle et calvados, et la pilule arrive à passer dans la brûlure de l’alcool.

En vérité, tu comprendras très bien, je le sais, je te connais, puisque tu es encore ici.

1 commentaire:

Marie a dit…

Les recruteurs recrutent dans ce qui était les colonies ...