lundi 30 novembre 2009

L'école de la République #6/6 : Le 21/11/2009 à 00h30, je persiste et signe, j’antidate.

6. Le 21/11/2009 à 00h30, je persiste et signe, j’antidate.

Ce n'est une surprise pour personne, chacun sait que je suis hostile au rejet de l'école auquel j'assiste et qui ressemble, malgré les mots doux pour le justifier, bien plus à un repli sur soi qu'à une tentative de conquête.

Le mot formatage m'est insupportable car l'école, quels qu'en soient les défauts, est le seul moyen de faire accéder aux enfants à la notion du vivre ensemble. Partager des savoirs communs. Construire des complicités semblables. Non seulement par des rencontres diverses un peu partout au gré du désir et de l’envie, mais par un rendez-vous quotidien, qu’il pleuve ou vente, qu’il neige ou caniculise, de telle heure à telle heure. Quelle que soit la curiosité des enfants, il est des domaines qui leur resteront inaccessibles si l'école ne se mêle pas un peu de les forcer à les regarder en face.

Alors, oui, les classes sont surchargées, certains profs sont nuls, certains autres épuisés, les enfants sont petits, mais on n'enseigne pas non plus de la même façon à des maternelles qu'à des sixièmes et prendre l'exemple de ceux-ci pour justifier l'absence de ceux-là est injuste. La belle idée libertaire menée trop longtemps fera des dégâts dont bien entendu personne ne sera responsable. Sauf bien sûr la "Société".

Nous vivons en société, que nous le voulions ou non, dans cette société-ci faite de beautés et d'horreurs, où l'on rencontre des Akynou de temps en temps, et des Hortefaux parfois aussi ou des Besson. Nous en sommes en partie responsables, de cette société que nous proposons à nos enfants, tout comme nous disions en 68 que la société pourrie de nos parents étaient leur faute.

Ne culpabilisons pas pour autant, et ne jetons pas les bébés avec l'eau du bain. Il nous appartient de leur apprendre à vivre dans cette société, à ces bébés, ou du moins de leur donner les armes pour s'y battre et s'y ébattre. L'orthographe, la belle écriture, le maniement des abstractions, le raisonnement mathématique, la rigueur scientifique, la curiosité perpétuelle, sont autant d'armes et il en est bien d'autres. Et le parent si attentif soit-il, l'enfant si intelligent soit-il, n'accèderont pas à ces richesses sans de solides enseignants qui leur pousseront le cul parfois.

Formatage? Quel mot impropre! Mise en ordre de marche, devrait-on dire. La dureté de l'école d'aujourd'hui n'est rien de plus que la dureté du monde qu'on leur a préparé, et à laquelle ils doivent être préparés.

Mais ce n'est pas une raison pour baisser les bras et cracher sur cette dure école, il faut combattre avec ce monde d'enseignement pour l'améliorer et cesser de désespérer les profs, qui sont un des derniers remparts contre l'avenir qu'on nous mijote. Rien d'ailleurs n'empêche les parents de poursuivre leur travail de parents que l'école n'assurera jamais, car si les parents ne sont pas l’école, l’école ne remplacera jamais les parents, et la disponibilité de la vacance leur est aussi nécessaire que la contrainte journalière, en les éveillant au monde, au monde des parents et au monde entier, et les fleurs du chemin redeviendront des poèmes.

On peut tant qu’on veut disserter sur Montaigne et Rousseau, de grands classiques de sujets du bac. Mais pour que la tête prenne une forme de bien faite, il lui faut de la matière à l’intérieur. Tout le monde n'a pas la chance d'être Mowgli.

Voilà, je me calme. Bonne nuit à toutes. Le combat touche à sa fin, je vais m’allonger ma tâche est finie, la vôtre commence dès que l’enfant paraît.


Commencé d’écrire le 21/11/2009 chez Lyjazz, terminé dans ma cave le 24/11/2009.

Est-ce une conclusion, un épilogue, une fin des fins ? Non, c’est le texte initial à partir duquel tout ce que j’ai raconté avant s’est inventé, et qui vient désormais comme la justification finale de ce qui précède. J’ai fortement réagi au mot formatage. Est-il si déplaisant que je l’ai d’abord supposé ? Maintenant, je n’en suis plus si sûr. Un formateur est aussi bien celui qui forme que celui qui formate, et la frontière de l’un à l’autre devient floue, incertaine, artificielle même.

Au fond, formation et formatage relève de la même intention, et tout au plus pourrons-nous donner un tour négatif à l’un, en ce sens qu’il déforme la spontanéité initiale, l’innocence primale, et un tour positif à l’autre en ce que la formation constitue le socle sur lequel l’enfant s’invente comme être social, sans quoi il ne pourrait devenir homme, humain. Mais cette différence des mots suppose que l'innocence primale existe. Or je ne crois pas que l’homme, l’humain, soit naturellement bon comme l'affirmait le vieux Jean-Jacques,.

Je prétends que rien n’est inné en lui sinon des circuits silencieux et inertes, et qu'il faut y mettre le courant de l’acquis, mettre le feu.

7 commentaires:

Lyjazz a dit…

Parce que je lis quand même dans tes lignes cette peur que ces enfants-là soient hors normes et hors société, parias en quelque sorte.
Parce qu'ils ne rentrent pas dans le moule, ne partagent pas les mêmes horaires et contraintes, les mêmes bagarres dans la cour.
Rassure-toi : ils partagent avec leurs copains scolarisés leur âme d'enfant, leur pays d'enfance, leur façon de jouer et d'apprendre au quart de tour un nouveau jeu, ou de l'inventer !
Oui, pour moi, ordonner des enfants, les empêcher d'être différents des autres, serait du formatage. Les confronter à la dureté de l'école pour leur montrer la dureté du monde est une vue de l'esprit. De la même façon qu'on frappe un enfant pour lui expliquer qu'il ne faut pas taper un chat ou un copain... je ne veux pas expliquer à mes enfants que la dureté de l'école leur montre ce que va être leur vie.
Sur un seul point je suis d'accord avec ton raisonnement : le plus difficile pour moi est de trouver comment pousser, ou ne pas pousser, c'est à dire motiver une passion, quand c'est une matière ou un sujet que je ne maitrise pas du tout. Et dans ce cas il me manque d'être épaulée par des personnes pédagogues vers qui je pourrais envoyer mon enfant. Il manque parfois l'émulation du groupe aussi.

Enfin, je suis sûre que l'école et les parents ne devraient pas être si séparés, si antagonistes parfois. Le boulot des 2 parties est différent, oui, mais ils peuvent, ou pourraient, devraient se rejoindre. Sans le faire. Et c'est regrettable.
J'ai passé de bons moments en tant que prof, et je croise encore des anciens élèves qui n'ont pas l'air mécontent de m'avoir fréquentée.
Je ne crache pas non plus sur l'Education Nationale, mais je tente de naviguer à ma façon, selon mes enfants et selon mes possibilités.
En me posant des questions.
Ce n'est pas si simple d'être en dehors des clous en permanence.
Et de devoir essuyer des questions et inquiétudes venant de toute part.
Mais j'assume. ça forge davantage le caractère. Et je sens, surtout, que je suis dans le vrai de ma vie, de la vie de mes petits.
Merci de ta réaction et d'avoir donné ton avis.

Lyjazz a dit…

Andrem, j'ai lu avec attention ton avis.
Je peux comprendre l'amour que tu portes à l'école, à sa vocation première, à ses émulations et découvertes.

Mais tu te doutes que je ne suis pas d'accord sur certains points.
J'emploie le mot formatage parce que c'est ce que j'ai personnellement ressenti de l'école, pour y avoir passé de trop longues années. J'y ai rencontré des personnes formidables et d'autres moins recommandables, comme partout ailleurs. Mais je m'y suis ennuyée, j'y ai beaucoup trop attendu la fin de l'heure. Et je n'ai gardé aucun ami réel d'aucune période scolaire.
J'ai pourtant ensuite voulu être prof, et je l'ai été, dans un mélange d'amour/haine pour l'Education Nationale.
J'aime beaucoup enseigner, mais les contingences des programmes et de la formation des enseignants sont telles que....
C'est donc en toute connaissance de cause que j'agis ainsi.
Et aussi selon la volonté de mes enfants. Qui ont par ailleurs tout à fait le temps d'intégrer l'école quand ils le souhaiteront (je rappelle qu'ils ont 5 et 4 ans, soit, pas bien vieux).
Formatage donc parce qu'il m'a fallu plusieurs années pour me rendre compte de ce rythme et de cette façon de penser stéréotypée, pour pouvoir, enfin, penser à mon rythme et vivre pour moi.
Non, l'école n'est pas le seul moyen d'enseigner aux enfants la notion du vivre ensemble.
Vivre sans école ne veut pas dire replié sur soi. Nous voyons des groupes, des enfants et des adultes, et nous vivons en société, aussi. Avec tout ce que ça implique de résolution de conflits, de jeux, de règles, d'organisation de groupe.
L'école est une façon de vivre ensemble avec des règles organisées pour qu'un adulte qui a la charge énorme d'un groupe de 30 enfants puisse passer, sur une heure, quelques 2 dizaines de mn à leur enseigner qqch, entre toutes les mises au point de l'organisation : s'installer, pas bouger, pas aller aux toilettes, remettre un enfant à sa place, etc.
C'est la même chose au collège et au lycée : 1h de cours est bien courte quand tous les élèves sont installés et ont compris et ont arrêté de tousser, parler, regarder derrière, etc.
J'aimerais mieux apprendre dehors, en mouvement.
Et ça correspond tout à fait à la vie, à la physiologie d'un petit enfant.
Pour rappel, dans beaucoup de pays l'école ne commence qu'à 6 ans : avant ça les enfants peuvent aller au jardin d'enfant et on ne leur demande pas de se plier à des horaires de pipi, ou de repos, qui ne peuvent jamais correspondre au plus grand nombre. Sans compter les évaluations parce que le petit n'a pas colorié en rose ce qu'on lui a demandé mais a préféré colorier en vert.
Bien entendu je souhaite que mes enfants intègrent les grandeurs de notre culture : belle orthographe et mathématiques, histoire et géographie, pour le moins.
Mais pas à 4 ans, ou alors d'une autre façon. Tu serais peut-être surpris de discuter avec des enfants non scolarisés. En as-tu rencontré ? Les connaissances acquises ne sont pas forcément les mêmes, ou pas apprises dans le même sens, mais le résultat de leur culture est bien là aussi !

Marie a dit…

Tu as dis ça, toi, en 68 ? on l'a entendu dire, c'est vrai ...
De formatage à lavage de cerveau, je ne sais pas comme on avance !
Tu te sens peut-être un peu seul dans ce combat de titans, et ce n'est pas simple de ne pas démissionner.

julio a dit…

Lyjazz se trompe et elle prend le risque de faire de sais enfants des malheureux qui ne pour-ont trouver leur place sur cette terre. Touts est violence sur cette terre, une violence équilibré pars la nature, l’homme parfois déséquilibre les événements, mais il n’est pas le seul il y a aussi d’autres animaux qui perde la tète ou les sens ! L’homme mais mi bon mi mauvais, la chair a sont propre dynamisme et les cellules leurs intelligences, et parfois elles deviennent folles, il ne contrôle pas vraiment et si il est très violents il peut tuer ! Personnellement je croie que le mal et la femelle auraient du être un, mais la nature qui aime le complexe a voulu nous forcer à la rencontre et il nous a coupés en deux ! Une nature divise apporte plus de richesses, et plus de douleur aussi.
Puis sais idées font peur sa voudrez dire que l’humain na pas de liberté ni d’initiatives il suffi de le dirige de puis l’enfance sur un chemin qui ne quittera pas ? Et bien bon courage !
Je suis d’accord avec marie

Lyjazz a dit…

Julio....comme tu y vas !
Tu as peur de mes idées et tu programmes déjà mes enfants comme des malheureux parce qu'ils ne se seront pas frottés depuis leur jeune âge à ce rythme insensé imposé par le groupe et la pression parentale ?
Est-ce bien raisonnable ?
Oui, la vie est dangereuse, et la nature est la plus forte.
Oui, nous sommes à la fois mâles et femelles bien mêlés.
On ne l'apprend pas à l'école.
Et tu confirmes que la plupart des personnes ont peur de ce qu'ils ne connaissent pas, sont troublés et défiants.
Tu confirmes que parfois, quand on est hors des clous, on passe pour le fou.
Alors qu'il y a quand même un certain recul maintenant sur ce phénomène de non scolarisation, notamment aux Etats Unis, et une littérature assez abondante à ce sujet, qui démontre bien que les enfants n'ont pas tous besoin du même cadre pour évoluer.

Marie a dit…

Ceux à qui ce serait le plus profitable n'ont pas les parents capables d'entrer dans ce long processus. Tiens, moi la première, je n'aurais pas su les mener jusqu'où ils sont parvenus (sans en être).

Andrem Riviere a dit…

Marie,

je profite de ton passage pour te souhaiter une bonne année. 2010 ne présente pas tous les attraits qu'elle devrait, elle est plombée d'origine, et je suis particulièrement bien servi en matière de plomb.

Elle pourra être pire, mais rien n'interdit de croire qu'elle pourrait être meilleure; 2009 fut morose et 2010 ne fera pas mieux, mais elle fera peut-être mieux que le pire que j'en attends. Comme nous disent nos politiques du haut du pavé, si ce n'était moi ce serait pire. Qu'ils parlent, je sais bien que c'est faux.

C'est bien là que le bât blesse, dans notre affaire d'école, face à la naïveté idéologique indestructible: la question de la compétence, du professionnalisme, du savoir-faire. On pourra gloser tant qu'on veut, sur cent professionnels, on a plus de chance de rencontrer 50 compétents que sur 100 amateurs, aussi bienveillants et charmants soient-ils.

Et je n'ai jamais eu peur de ce que je ne connaissais pas, bien au contraire, ma vie fut de me jeter dans l'ignorance pour la transformer en savoir, fragile et douteux, mais moins ignorant qu'hier. Voilà. Je retourne à mon buissons d'épines, je n'ai pas fini de me guérir.

Le corps va bien, que nul ne s'alarme.